Quand l’inclusivité fait la différence : le cas WAAM

WAAM (We Are All Métis) est une de ces jeunes DNVB, ‘Digital Native Vertical Brand’, qui sont l’objet de toutes les attentions sur le marché depuis plusieurs années. Innovantes, en rupture avec les pratiques habituelles, et parvenant à gagner la confiance et la sympathie d’un consommateur toujours plus méfiant, ces jeunes pousses sont désormais scrutées pour en identifier les bonnes pratiques. Lancée en 2016 par Dieynaba Ndoye, la marque de cosmétique est souvent qualifiée ‘d‘inclusive’. 

 

Mais c’est quoi être inclusif en 2023 ? 

Waam - Instagram

Inclusivité : avant-garde ou sine qua none ? 

Le terme d’inclusivité, inconnu il y a encore quelques années (il ne fait pas encore partie du dictionnaire) s’est substitué il y a peu à des termes comme intégration ou diversité. La notion d’inclusivité comprend en effet l’idée d’une plus grande place laissée aux minorités quelles qu’elles soient, et non d’une intégration, parfois synonyme de dissolution, dans la majorité. 

En effet, on inclut aujourd’hui les minorités pour ce qu’elles sont, avec leurs sensibilités, leurs combats et leurs visions. L’idée d’inclusivité se manifeste envers différentes populations, qu’ils s’agissent de minorités ethniques, religieuses, sexuelles ou de genre, parfois également de condition sociale (neurodiversité, handicaps). 

Si le concept n’est pas nouveau et est issu du milieu universitaire afro-américain, il a mis un certain temps à s’imprimer dans les stratégies marketing des marques. On trouve quelques exemples précurseurs, notamment Dove ou Benetton, mais force est de constater que jusqu’à ces dernières années, l’écrasante majorité des campagnes publicitaires ne laissaient pas une grande place à ceux qui sortent de la norme. 

Parmi les marques ayant fait de l’inclusivité une part de leur identité, comment ne pas citer Fenty Beauty, la marque de Rihanna sous l’égide du groupe LVMH ? Une diversité impressionnante de teintes de fonds de teint, une communication aux égéries éclectiques et singulières et une place laissée à tous ceux qui veulent donner de la voix. Au vu du succès rencontré, les géants MAC ou L’Oréal n’ont pas tardé à prendre le train en marche et de nombreuses jeunes marques s’emparent du sujet, au rang desquelles WAAM.

Gucci crée la polémique en 2019 avec un pull évoquant le blackface.

Attention au bad-buzz !

Aujourd’hui, il semblerait que beaucoup de marques tendent à diversifier leurs campagnes, montrer de nouveaux visages et adopter une communication plus inclusive. En effet, on peut même penser que ne pas le faire serait une prise de risque, tant le sujet est sensible. En quelques heures, une polémique online est vite enflammée et les effets pour l’image de l’entreprise peuvent être parfois dévastateurs. 

Les exemples sont légions, des accusations d’appropriation culturelle de Dior pour son parfum Sauvage avec Johnny Depp à la polémique du pull ‘blackface’ Gucci, la communication pourrait sembler un art périlleux dans un contexte explosif. 

Ce n’est donc pas étonnant de constater un réel intérêt des entreprises pour ces problématiques, notamment pour attirer les plus jeunes. En effet, 57% des 18-34 ans estiment que leur entreprise devraient s’engager pour plus de diversité.

Cependant, se lancer dans l’inclusivité à l’aveugle et adopter une politique de quota pour s’assurer de cocher des cases dans ses campagnes ne parait pas une stratégie judicieuse. Les consommateurs, toujours plus avertis et sensibilisés à ces questions disent sentir le manque de sincérité d’un message, ou l’impression d’une prise de position ‘molle’ et sans substance. 

57% des 18-34 ans estiment que leur entreprise devrait s’engager pour plus de diversité

Inclusivité en entreprise : et si on commençait par l’interne ? 

Les études le montrent, que ce soit en France ou aux Etats-Unis, les grandes entreprises reproduisent les inégalités constatées dans la société. Qu’on parle d’écarts de poste ou salaire femme-homme à la faible représentation des minorités ethniques, en passant par la difficulté d’assumer son orientation sexuelle au bureau, les exemples sont légions. Encore en 2019, les femmes ne représentaient que 22% des cadres supérieurs en France (étude Deloitte). 

De même, l’interdiction sur les statistiques ethniques ou liées à l’orientation sexuelle ne permettent pas d’avoir une vision précise de la situation sur ces points, cependant force est de constater qu’aucun CEO du CAC40 n’est issu de la diversité. 

Ainsi, on voit de plus en plus d’entreprises prendre le parti d’embaucher des ‘responsables diversité’ et autres ‘head of inclusivity’. Gucci a mené le bal dans le luxe, ont suivi Prada, Burberry et Chanel. Ces nouveaux postes ont pour but d’encourager un recrutement plus diversifié, de prévenir les discriminations dans l’entreprise et de favoriser un meilleur partage des connaissances et compétences. 

Il est même prouvé qu’une politique d’inclusivité bien menée est profitable à terme, jusqu’à 30% de CA supplémentaire par salarié* ! 

Un des buts de la manoeuvre est également de se prémunir des précédemment mentionnés bad-buzz, avec l’espoir qu’une plus grande diversité chez les collaborateurs permettra d’éviter insensibilités et dérapages politiquement incorrects, par ignorance ou mépris. 

quelle est la recette magique de l'inclusivité ?

La voie de l’inclusivité semble être un véritable champ de mine, n’est-ce pas ? Mais alors comment entrer dans le vertueux carré des marques réellement inclusives ? 

WAAM en est un bon exemple. La marque est fondée sur une véritable philosophie, des valeurs qui imprègnent chaque point de contact entre la firme et son consommateur. 

  • Une volonté de mettre en valeur des ingrédients, produits et savoir-faire du monde entier, de partager les cultures et favoriser l’échange, ce fameux métissage, à l’image de la fondatrice globe-trotter et auto-proclamée ‘citoyenne du monde’.
  • Une invitation à développer ses propres cosmétiques, le concept étant centré sur le DIY et la ‘slow beauty’, en accord avec des notions de fait-maison, de sobriété dans la consommation et d’une parfaite adéquation avec les besoins propres à chacun. 
  • Un engagement responsable, un souci de faire au mieux pour respecter et préserver l’environnement, sans pour autant se prétendre ‘carbon neutral’. WAAM adopte une position bien plus honnête d’amélioration permanente et de recherche continue du plus clean, plus green. 
  • Enfin, une véritable considération sociale et éthique, qui se fait plus rare dans le champ de l’inclusivité, en s’inscrivant dans le cadre du commerce équitable. Ainsi, ce sont des impératifs de juste rémunération, d’égalités des sexes ou de mise en valeur des producteurs auxquels la marque s’astreint. Même le choix des prestataires s’aligne dans un processus d’accompagnement à l’emploi des personnes en situation de handicap. 
 

Pour autant la marque s’en tient à son identité de simplicité, de sobriété, mieux vaut se taire que trop en dire. La marque est vegan et cruelty-free mais n’en fait pas son angle principal. Elle fait la part-belle à ses collaborateurs sans sentir le besoin d’en souligner la diversité. Les visuels de communication représentent une diversité de femmes, mais la prise de parole se centre sur les ingrédients ou le bien-être personnel. 

Et si finalement, c’était ça la clé ? Agir avant de parler, être avant de revendiquer. Ne pas chercher à trop en faire pour suivre la vague mais réellement s’interroger sur notre impact et nos axes d’amélioration. Un mouvement de fond plutôt qu’un coup de com. Nul doute que le consommateur vous en sera gré. 

Transformer ses convictions en projets, ses valeurs en vertus. C’est très Brain & Heart tout ça, non ? 😉 

Thibaut Elijah, Consultant / Planneur Stratégique Brain&Heart

*Source : Etude Deloitte, Diversité et Inclusion, 2019